Laurette Aspe ne rate pas une occasion d’aller au théâtre. Malvoyante, elle fréquente assidûment Le Rive Gauche, toujours accompagnée de sa chienne, Polka, et d’une curiosité intacte.
Kinésithérapeute durant sa vie professionnelle, Laurette a longtemps manqué de temps pour s’asseoir dans une salle. « Le travail me laissait peu de place pour le théâtre », confie-t-elle. Aujourd’hui à la retraite, elle rattrape le temps perdu et profite pleinement des programmations. Atteinte de dégénérescence maculaire, sa vue diminue année après année. « En vieillissant, tous les autres sens s’affaiblissent aussi. J’ai davantage besoin d’accompagnement ». Elle va souvent au CDN, plus rarement au Théâtre des arts, car il n’y a pas de place au premier rang pour sa chienne, et se réjouit que le Rive Gauche renforce son offre pour les personnes en situation de handicap. « Je ne suis pas dans la revendication, la société ne nous doit rien. J’aime seulement prendre ma place et avancer avec les autres. »
L’audiodescription, un art subtil
Ce qu’elle préfère, ce sont les pièces de théâtre, en audiodescription. « Une bonne audiodescription ne commente pas tout, elle donne l’essentiel et laisse le temps d’imaginer les visages, d’intérioriser les situations ». Laurette a aussi participé à des visites tactiles des décors, une mise en condition qui permet de mieux suivre ce qui se passe ensuite sur scène : « j’ai vu un spectacle sur Camille Claudel où le papier avait un rôle central. Toucher les éléments m’a permis de comprendre l’intention scénique et de ne pas être perdue. »
Elle se souvient avec émotion de Peer Gynt d’Ibsen au CDN, présenté et accompagné par David Bobée, et du lien tissé avec Baptiste Martel qui était référent handicap au Rive Gauche. « On profite tellement plus de l’expérience quand on a les clés pour comprendre un spectacle et qu’on est conseillé. » Quant au nouveau système de navette mis en place par le théâtre, c’est un vrai plus selon elle. « Rentrer seule, le soir, ne me met pas en confiance. La navette change tout. »
Curieuse et ouverte, Laurette tente aussi de nouvelles expériences. Elle a, par exemple, suivi une audiodescription pour un spectacle de danse. « Là, ça n’a pas été concluant, sourit-elle. Les descriptions étaient trop techniques. Mais je suis toujours partante pour tester de nouvelles approches » sourit-elle, convaincue que c’est en essayant qu’on fait avancer les choses.