Incendie chez Bolloré Logistics : la Ville voisine de Grand-Couronne va porter plainte

L'incendie des quelques 12 000 batteries au Llthium et 70 000 pneus a duré une semaine avant d'être entièrement éteint par les sapeurs-pompiers - Tanguy Lacroix.

À l’issue d’un conseil municipal exceptionnel, la Ville voisine de Grand-Couronne a annoncé le 27 février qu’elle déposerait plainte suite à l’incendie survenu le 16 janvier dernier dans l’entrepôt de l’entreprise Bolloré Logistics. Environ 12 000 batteries au Lithium et 70 000 pneus avaient brûlé pendant une semaine, le nuage de l’incendie s’est ensuite dispersé dans toute la Métropole.

Dès le lendemain de l’incendie, l’association Atmo Normandie* a modélisé la circulation du panache de fumées issue de l’entrepôt abritant environ 12 000 batteries au Lithium et 70 000 pneus. Le nuage a survolé de nombreuses communes, dont Saint-Étienne-du-Rouvray, “une trajectoire corrélée avec les teneurs en particules mesurées par Atmo Normandie et les signalements des habitants” a commenté l’association. (voir tweet ci-dessous).

«On a eu des maux de gorge jusqu’au lendemain. On a eu aussi beaucoup des maux de tête», rapporte Laetitia Herambert, une habitante de Grand-Couronne. D’après un communiqué publié le 27 janvier, “Atmo Normandie a constaté une augmentation des particules en suspension (PM10) en lien direct avec l’incendie en particulier sur les stations de Grand-Couronne-Mairie et de Sotteville-lès-Rouen (Centre hospitalier du Rouvray). Ces augmentations sont restées ponctuelles et n’ont pas atteint le seuil journalier”. Le 15 février, la Préfecture de Seine-Maritime a indiqué sur son site que “la qualité de l’eau du robinet [était restée] pleinement propre et saine à la consommation.” ; qu'”Aucun signal sanitaire lié au recours aux soins d’urgence n’a été détecté depuis la journée du 16 janvier 2023, à ce stade” et que ” le lithium et les composés organiques chlorés et fluorés susceptibles d’être émis dans ce type d’incendie n’ont pas été retrouvés dans les échantillons”.

«Ça partira dans l’estomac des bestioles ou des consommateurs»

Qu’en est-il des autres types de pollution? Deux semaines après l’incendie, au milieu des champs de Grand-Couronne, deux hommes prennent des photos des sols. L’un d’eux est Christophe Holleville, secrétaire de l’Union des Victimes de Lubrizol. «Cette pollution au sol, aucun communiqué n’en parle ! Là on est dans un champ où à mon avis ils cultivent car il y a des traces de tracteur. Et on voit qu’il y a des résidus. Donc là on ne sait pas, on va re-semer, on va refaire du foin, avec des plaques de tôle, des morceaux de batteries, des débris, des j’en-sais-rien puisque personne ne fait d’analyse. Et ça partira dans l’estomac des bestioles ou des consommateurs qui boufferont ça plus tard.» Dans le champ, il désigne plusieurs agglomérats de pâte noirâtre, durcie, et tombée du ciel, et des débris ressemblant à des morceaux de métaux carbonisés. «Il y a des morceaux qui sont plus gros que ma main» précise-t-il.

Une accumulation de plaintes

Julia Massardier est avocate au barreau de Rouen. Elle est habituée à traiter des accidents industriels car elle suit l’affaire de l’incendie de l’usine Lubrizol aux côté des plaignants. Aujourd’hui, elle accompagne des habitants de Grand-Couronne. Pour le moment, elle a déposé trois plaintes, et d’autres sont à venir. «Les autres ont envie de détailler un peu plus leur préjudice dans leur plainte. Il y a une personne qui m’a fait état d’odeurs chez elle, donc elle veut faire venir quelqu’un pour faire des constatations. Il y en a d’autres qui veulent aller voir leur médecin. Le temps que les rendez-vous soient pris, les pièces soient organisées et que les plaintes soient rédigées, ça met un petit peu de temps.» Dernièrement, c’est la commune de Grand-Couronne qui s’est prononcée, lors d’un conseil municipal exceptionnel le 27 février : la maire s’est vue autorisée à mener une action en justice au vu des préjudices financiers, humains et moraux que subit la commune.

Quant aux plaintes déjà déposées, on y retrouve différents éléments que les plaignants considèrent comme un préjudice : «les odeurs chez eux, un préjudice moral d’une angoisse envahissante et puis quelqu’un m’a fait état de difficultés respiratoires».

Le manque de contrôle pointé du doigt

Une semaine après l’incendie, trois élus locaux, Nicolas Mayer-Rossignol, Charlotte Goujon et Julie Lesage, interpellaient le ministre de l’Intérieur dans une lettre ouverte. «Le Département de Seine-Maritime est le plus exposé de France en matière de sécurité industrielle», écrivent-ils. Le communiqué rappelle que «l’État […] a annoncé en 2020 des créations de postes en matière d’inspection, la Seine-Maritime n’a bénéficié que de deux postes supplémentaires, ne permettant pas d’atteindre l’objectif de +50% des visites». Pourtant, l’agglomération de Rouen – dont fait partie Grand-Couronne – est connue pour ses accidents industriels réguliers. Outre les problèmes de contrôles en amont, quelle gestion des conséquences a posteriori?  C’est au pollueur de payer pour la dépollution ! » s’insurge Christophe Holleville. « Les morceaux sont encore partout et l’État n’est même pas foutu de dire : messieurs dames de chez Bolloré, il va falloir nettoyer tout ça. On ne peut pas laisser ça dans la nature !»

*Association agréée de surveillance de la qualité de l’air en Normandie

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