« Si le 5 décembre tout le monde est dans la rue, il peut y avoir marche arrière »

La grève du 5 décembre va-t-elle être le coup d’envoi d’un important mouvement social contre une réforme des retraites tant redoutée et régressive ? C’est le souhait de plusieurs retraités stéphanais qui appellent les jeunes et les actifs à être massivement présents dans la rue.

Que l’on ne s’y trompe pas, la grève du jeudi 5 décembre n’est pas une mobilisation pour les retraités et leurs retraites actuels. L’enjeu de cette réforme des retraites menée par Emmanuel Macron et son gouvernement concerne tout le monde : futurs retraités, actifs, jeunes. C’est le message martelé par Danielle Boulais, Geneviève Lugat et Jacques Coté, des Stéphanais et animateurs de la section locale de l’Union nationale des retraités et personnes âgées (UNRPA) : « Nous sommes conscients que la réforme ne vise qu’à réduire le montant total des retraites et que, malgré les affirmations du gouvernement, les retraités actuels comme les futurs seront concernés par le gel prévisible des pensions et par le report de la durée de cotisation. »

Pour ces retraités déplorant des retraites actuelles déjà en baisse, le niveau des prochaines retraites va continuer à s’aggraver : « Nous avons de bonnes raisons de nous inquiéter et si notre avenir est sombre, celui de nos enfants et petits-enfants sera pire. » Michaël Zemmour, maître de conférences en économie à l’Université Paris 1 et chercheur associé à Sciences Po au Laboratoire interdisciplinaire d’évaluation des politiques publiques (LIEPP), confirme bien ces inquiétudes : « L’élément central de la réforme, c’est de créer un système où les pensions s’ajustent automatiquement à la baisse à mesure que l’espérance de vie s’allonge. » Les propos de ce chercheur sont à découvrir dans Le Stéphanais n°268 qui sortira le 5 décembre. Dans cette édition, un dossier de 4 pages sera consacré à la réforme des retraites.

Un choix politique régressif

« Dans la nouvelle réforme, il serait question que le financement des retraites soit bloquée à 14,8 % du PIB. Vu l’augmentation du nombre de retraités, cela réduira encore le montant des pensions, affirme Danielle Boulais. Pour financer les retraites par répartition pour tous, d’autres moyens existent, c’est une question de choix politiques », ajoute-t-elle.

Augmenter les cotisations, revenir sur certaines exonérations de cotisations sociales, dans Le Stéphanais du 5 décembre prochain, le maître de conférences Michaël Zemmour cite plusieurs mesures permettant d’équilibrer le système par répartition sans baisser les pensions et travailler plus longtemps, pour faire face à l’augmentation du nombre de retraités.

Le spectre de novembre 1995 plane

À deux jours de la grève, l’heure est à la mobilisation générale. Même si les défaites sociales ont été plus nombreuses ces dernières décennies, Danielle Boulais, Geneviève Lugat et Jacques Coté pensent que le fort mécontentement social de ces derniers mois peut conduire à une issue victorieuse. « Si le 5 décembre, tout le monde est dans la rue, il peut y avoir marche arrière. »

Ces Stéphanais ont en mémoire le grand mouvement social de novembre 1995 contre la réforme des retraites d’Alain Juppé. Le Premier ministre de cette époque était pourtant « droit dans ses bottes » selon son expression destinée à montrer sa détermination à aller au bout de cette réforme. Une réforme qui avait été retirée au bout de trois semaines de paralysie de l’économie française. « En 1995, c’était phénoménal, il y avait tout le monde : la fonction publique et le privé. Quand on dit que l’union fait la force, c’est réel », assure Geneviève Lugat.

Un appel à la jeunesse

Par solidarité avec les actifs et les jeunes, ces retraités seront présents dans la rue ce jeudi 5 décembre. Ils ont d’ailleurs appelé tous les adhérents de l’UNRPA à faire de même. « Nous, on se bat surtout pour l’avenir. Notre retraite, c’est bon on l’a et on essaye de défendre les quelques acquis qui nous restent. Mais on ne peut pas non plus le faire pour les jeunes. Il faut aussi qu’ils se mobilisent, remarque Danielle Boulais. Certains actifs et jeunes ne se rendent pas compte parce que la retraite est tellement loin pour eux. Mais plus on laisse grignoter, plus on va se faire grignoter. »

Pour cela, Danielle Boulais fait référence à une conversation qu’elle avait eu avec son fils plutôt résigné : « Tu sais, si en 1936, les gens avaient dit qu’ils n’y arriveraient jamais, qu’il fallait tout accepter, il n’y aurait pas de congés payés, de sécurité sociale, il n’y aurait pas tout ça. »

Vers une journée “ville morte” ?

Malgré tout, ces retraités stéphanais ont de l’espoir dans la jeunesse : « Les jeunes ne sont pas tous résignés, ils se réveillent, on commence à les voir un peu plus dans les manifestations. » Ils défendent donc une journée « ville morte » : « Il faut que les gens soient vraiment mobilisés ce jeudi et qu’ils n’aillent pas faire leur course dans les supermarchés. En voyant l’économie bloquée une journée, le gouvernement pourrait prendre peur en cas de deuxième journée. »

Selon un sondage de l’institut Odoxa-Dentsu Consulting réalisé sur internet auprès d’un échantillon de 1000 personnes les 27 et 28 novembre derniers, une majorité (66%) de Français estime que la grève du 5 décembre est justifiée.

Pour l’agglomération rouennaise ce jeudi, le rendez-vous du départ de la manifestation est fixé à Rouen, cours Clemenceau à 10 h. Le mouvement étant reconductible, une assemblée générale aura lieu après la manifestation, pour décider de la suite des actions.

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