Vente de Chapelle-Darblay: 
la Métropole s’invite dans le débat

Alors que le groupe UPM a fait part de sa volonté de vendre Chapelle-Darblay aux porteurs d’un projet mêlant production d’hydrogène et traitement des déchets, la Métropole Rouen Normandie a annoncé vouloir faire jouer son droit de préemption pour donner une chance d’aboutir au projet papetier porté par Veolia/Fibre excellence.

Du côté de Grand-Couronne, le feuilleton de la papeterie Chapelle-Darblay connait de nouveaux rebondissements. Vendredi 15 octobre, le conseil de surveillance du groupe finlandais UPM a validé le choix de l’acheteur pour son site industriel fermé depuis l’été 2020: il s’agit de la société Samfi invest associée au groupe Paprec. Leur projet: d’un côté produire de l’hydrogène par électrolyse, d’ici trois à cinq ans, et de l’autre développer une activité de conditionnement de déchets (papiers, cartons, plastiques, métaux…) pour les acheminer vers des centres de recyclage situés à l’étranger, en particulier en Allemagne.
Selon les deux repreneurs, près de 450 millions d’euros seraient investis pour parvenir à la création de cette nouvelle entité qui enterrerait définitivement l’activité papetière locale puisque les machines devraient être démantelées pour laisser la place aux installations destinées à produire de l’hydrogène.
Côté emploi, les deux acteurs promettent autour de 300 emplois directs et 400 indirects une fois l’ensemble du site en ordre de bataille. Dans l’immédiat, quelques dizaines seraient garantis par l’activité liée aux déchets.

Loin d’être une surprise

Cette décision d’UPM est loin d’être une surprise pour les trois derniers représentants syndicaux de Chapelle-Darblay qui militaient, eux, pour le projet concurrent du groupe Veolia associé à la société Fibre excellence, premier producteur français de pâte à papier marchande. Les deux entités souhaitent elles produire du carton d’emballage, 400 000 tonnes annuellement, à partir de papier et de carton recyclés sur place avec l’embauche d’environ 250 salariés dans un premier temps. «Et d’autres activités connexes pourraient y être associées par la suite», précise Arnaud Dauxerre, représentant des cadres, qui avec ses deux camarades de la CGT, ne veut pas se résoudre à voir disparaître un outil exemplaire en matière d’économie circulaire sur un site industrialo-portuaire de 33 hectares idéalement situé en bord de Seine.
Si ce projet a été déposé en urgence la veille du conseil de surveillance, c’est que «c’était une étape indispensable, même si nous savions qu’il ne serait pas véritablement examiné par UPM», assure Arnaud Dauxerre.
Une situation qui n’a pas échappée au ministre de l’économie Bruno Lemaire et à la ministre déléguée à l’industrie Agnès Pannier-Runacher qui ont fait savoir qu’il regrettait «qu’UPM n’ait pas retardé sa prise de décision alors même que les deux offres n’ont pas pu bénéficier d’un examen suffisamment détaillé . Une prise de position qui ne devrait pas faire changer d’avis UPM, visiblement pressé de se séparer de cet actif encombrant qui pourrait lui rapporter entre 7 et 8 millions d’euros.

«L’offre de Veolia est sérieuse»

Seulement voilà, s’il était si important que Veolia dépose son offre, même au dernier moment, c’est qu’un autre acteur a décidé de s’impliquer concrètement. La Métropole Rouen-Normandie, par la voix de son président Nicolas-Mayer Rossignol, a fait savoir qu’elle souhaitait faire jouer son droit de préemption sur l’ensemble du site, outil industriel inclus, avant de le revendre à Veolia. «Nous n’avons évidemment pas vocation à devenir papetier», précise l’élu socialiste qui n’avait jamais caché son peu d’enthousiasme vis à vis du projet Samfi/Paprec. «Mais l’offre de Veolia est sérieuse et correspond davantage à ce que nous voulons défendre sur notre territoire. L’enjeu derrière tout ça, c’est de savoir si une collectivité comme la nôtre reste les bras ballants face à des choix privés en regardant passer les trains de la mondialisation ou si elle agit en utilisant les outils à sa disposition».
Les études juridiques sont actuellement en cours pour définir les modalités d’application de ce droit de préemption avec comme première condition qu’UPM procède effectivement à la vente de son site en formalisant sa Déclaration d’intention d’aliéner. «À ce moment-là, la Métropole a deux mois pour se positionner», continue Nicolas Mayer-Rossignol. Le prix de vente sera alors fixé par le service des Domaines. Un processus qui peut prendre du temps, surtout si UPM décide de jouer la montre ou conteste devant la justice ce droit de préemption. Tout comme pourraient le faire les autres porteurs de projet.
Pour l’heure, ce risque d’enlisement n’inquiète pas outre-mesure le président de la Métropole, mais reste une réalité selon les syndicats. «Nous ne sommes pas non plus à l’abri d’un démantèlement sauvage des machines par UPM», craint le cégétiste Cyril Briffault qui promet que «si un camion passe les portes de l’usine, nous ne nous laisserons pas faire. Nous avons déjà mis en place des rondes de surveillance et nous serons extrêmement vigilants dans les semaines et les mois à venir». Un avertissement qui promet d’autres rebondissements à ce feuilleton industriel loin d’être terminé.

«Il faudra que tout le monde soit au rendez-vous»

Parmi les élus qui s’intéressent à l’avenir de Chapelle-Darblay, le député communiste Hubert Wulfranc est au premier rang. Ce mardi 19 octobre, il a d’ailleurs profité d’une cession de questions au gouvernement à l’Assemblée nationale pour lui demander s’il allait tout mettre en œuvre pour accompagner la Métropole Rouen-Normandie dans sa volonté de préempter le site.
En réponse, Agnès Pannier-Rumacher a simplement confirmé que le gouvernement «sera au rendez-vous pour accompagner toutes solutions permettant de maximiser le nombre d’emplois industriels créés dans des activités au service de notre transformation environnementale». Pas forcément satisfaisant pour le député qui a tenu à insister sur le fait que «ce n’est pas la même chose pour une collectivité comme la Métropole qui prend une telle décision […] si elle dispose du soutien plein et entier de l’Etat. Car pour arriver à sauver le site et à lui conserver sa vocation papetière il faudra que tout le monde soit au rendez-vous».

 

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