Pollution aux hydrocarbures: des relevés sur le sol stéphanais à approfondir

Une fois analysés, les lichens présents sur les arbres donnent une indication des pollutions présentes dans l’atmosphère. Ici, devant l’usine Lubrizol à Rouen. Photo: Jean-Pierre Sageot.
Une étude sur les retombées de l’incendie de Lubrizol a permis de révéler des taux anormalement élevés d’hydrocarbures à Saint-Étienne-du-Rouvray. Des analyses plus poussées seront nécessaires pour en préciser les sources.

 

Deux semaines après l’incendie de Lubrizol le 26 septembre 2019, des prélèvements de lichens ont été effectués sur les arbres de vingt-trois communes traversées par le nuage d’hydrocarbures qui a émané de l’usine plusieurs heures durant. “Les lichens constituent de véritables éponges, ils stockent l’air pour effectuer leur photosynthèse, et récupèrent ainsi les composés présents dans l’atmosphère toute l’année, dans des proportions égales à celles diffusées dans l’air”, précise le docteur Philippe Giraudeau, fondateur de la société en charge de l’expertise, Aair lichens. De nouveaux prélèvements ont été effectués en décembre 2020 pour mesurer la persistance des polluants. Six communes témoin, dont Saint-Étienne-du-Rouvray, avaient alors été ajoutées.Publiés en juillet dernier par la préfecture de Seine-Maritime, les résultats révèlent qu’en 2019 les lichens ont bien subi une exposition «aiguë et ponctuelle» à des retombées d’hydrocarbures aromatiques polycycliques (HAP). À cette conclusion s’ajoute une donnée surprenante : le prélèvement effectué sur le sol stéphanais (rue Lazare-Carnot) est celui qui concentre le plus fort taux de polluants. Bien que le nuage noir de l’incendie ne soit pas passé au-dessus de la ville, cette mesure est par ailleurs la seule à dépasser le seuil d’alerte, établi par Aair Lichens. Le prélèvement révèle un taux d’hydrocarbures (HAP16) de 2049 ug/ kg pour un seuil d’alerte fixé à 1500. Parmi ces HAP16, le taux de benzo(a)pyrène (substance la plus cancérigène) atteint 109 ug/kg à Saint-Étienne-du-Rouvray, pour un niveau d’alerte fixé à 60 ug/kg.

D’autres mesures nécessaires

D’où viennent ces pollutions ? Pour Philippe Giraudeau, « les émetteurs principaux de ces HAP sont les industries et les moteurs diesel ». Le trafic sur le boulevard industriel, le rond-point des Vaches ou encore la ligne ferroviaire pourrait être en cause ? «Ce n’est pas exclu. Ces points de circulation entraînent ralentissements et accélérations des véhicules. Or plus c’est fluide, moins ça pollue. Cela peut aussi provenir d’industries des villes voisines. Le seul moyen de situer les sources est d’effectuer d’autres mesures», ponctue le spécialiste.

Une conclusion partagée par la directrice d’Atmo Normandie, Véronique Delmas, qui tempère par ailleurs les résultats de l’étude. «Le seuil d’alerte établi par Aair Lichens n’est pas sanitaire, c’est un seuil de vigilance établi au regard des données collectées par le laboratoire. Il faut aussi différencier les mesures faites dans les lichens et celles effectuées dans l’air que nous respirons.» Depuis janvier 2021, une station Atmo située au centre hospitalier du Rouvray mesure la présence de benzo(a)pyrène dans l’air. Le taux oscille entre 0,02 et 0,21 ng/m3, soit bien en deçà du seuil d’alerte sanitaire annuel fixé à 1 ng/m3. La source de la forte pollution contenue dans les lichens reste pour le moment inexpliquée. Le rapport indique que “ce sont des valeurs qui mériteraient d’être suivies et investiguées”, mais pour Philippe Giraudeau «cette mesure témoigne d’une pollution chronique».

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